Les incursions et attaques meurtrières menées depuis le 26 février par les rebelles du M23 appuyés par le Rwanda qui se sont soldées par la prise de contrôle de Goma remémorent le tragique génocide qui prit place en 1994 avec le massacre des Tutsis. Ces multiples attaques en territoire congolais tendent à prouver s’il en était besoin les énormes failles existantes dans le système sécuritaire du président Tshisekedi. 

Les faits 

L’assaut lancé par les Forces armées rwandaises avec le concours des rebelles du M23 fut d’une très grande ampleur et aura surpris le pouvoir congolais. Des véhicules blindés, drones et troupes d’élite ont été engagées massivement pour submerger rapidement les forces congolaises et leurs supplétifs locaux.

Felix Tshisekedi s’en est violemment pris à son commandement militaire qui a fait preuve de laxisme et totalement failli à sa mission de sauvegarde de la sécurité dans sa province orientale. Il a même accusé ses principaux généraux d’avoir détourné au cours de ces dernières années les fonds destinés à l’effort de guerre.

Cette prise de position vient soutenir le récent limogeage du CEMA congolais, le général Christian Tshiwewe. Ce dernier avait entre autres méfaits menti sur les chiffres des recrutements prévus à 40.000 hommes au lieu des 13.000 effectifs. Il en fut de même pour les achats d’armes et autres équipements militaires. Dans ce constat il a aussi mentionné le général Ntumba chef de la Maison Militaire qui aurait falsifié des commandes de matériel auprès de divers courtiers étrangers. 

Par ailleurs les sociétés de formation françaises (AGEMIRA) et israéliennes attachées aux forces spéciales congolaises se sont avérées inefficaces pour combattre et contrer l’invasion adverse. De nombreuses désertions de soldats congolais ont été relevées soit en se réfugiant auprès de la mission onusienne MONUSCO soit fuir au Rwanda.

Une corruption à grande échelle

La récurrence du non versement des maigres soldes aux militaires sous-tend très souvent les désertions des soldats ou leurs ventes d’armes et équipements militaires. Dans cet important trafic le gouverneur militaire de Goma l’a d’ailleurs payé de sa vie en janvier dernier. Il aurait été impliqué dans un système affairiste avec divers groupuscules armés dont les FDLR/Forces Démocratiques de Libération du Rwanda constituées d’anciens génocidaires hutus de 1994.

Du fait de ce fiasco tragique le ministre de la Défense Mwadiamvita se trouve également sur la sellette en regard de son incompétence et ignorance de la situation militaire. Il pourrait faire les frais d’un prochain remaniement gouvernemental.

Tshisekedi compose actuellement un cabinet restreint de crise pour tenter d’adopter plusieurs doctrines d’engagement. Poussé par des « faucons » il pourrait adopter une posture guerrière pour une guerre frontale avec le Rwanda mais qui ne serait pas sans risques. En effet la volatilité et la grande fragilité des troupes congolaises et surtout la perte de l’aéroport de Goma, stratégique pour acheminer renforts en hommes et matériels, rendent cette option très hasardeuse.

Par ailleurs le commandement militaire congolais craint que les opérations rwandaises continuant les combats ne s’emparent d’autres aérodromes et sites militaires de la région.

Un courant plus modéré tente de faire valider un canal de négociation discret avec le M23 et le président rwandais Kagame. Cette version permettrait d’éviter l’effondrement du pouvoir bien que le dialogue avec le M23 a toujours été farouchement écarté. Cependant Kinshasa reproche toujours à Kagame d’empêcher le retrait des troupes du M23 et rwandaises du Nord-Kivu.

Diplomatie de crise

Depuis la perte de Goma Tshisekedi multiplie ses efforts auprès de l’ONU, l’OUA, les chancelleries sud-africaines, angolaises et même à Paris pour tenter d’obtenir un rapide cessez-le-feu et éviter le pire pour les populations du Nord-Kivu.

Sa requête auprès du Conseil de sécurité de l’ONU s’est trouvée déboutée par la présidence algérienne du moment qui a justifié ce rejet à l’aune des rapprochements entamés par Kinshasa avec le Maroc. Le président sud-africain Ramaphosa qui par ailleurs a perdu une bonne dizaine de soldats a soutenu la nécessité d’un cessez-le-feu auprès de Kagame.

La volatilité et l’absence de doctrine claire de la part de Tshisekedi nuit également aux éventuels soutiens de la communauté occidentale. De même l’investiture récente de Trump complexifie les négociations sans écarter les récentes attaques de la foule congolaise sur les chancelleries américaine, française de Kinshasa qui le marginalise encore plus.

Quant à la position française sur la prise de Goma, elle reste à jamais imprécise et sans aucun poids dès lors que Macron a totalement émasculé notre diplomatie au cours de ses sept années de pouvoir. Rappelons aussi sa visite réalisée en mars 2023 à Kinshasa où il fut d’une inqualifiable maladresse à l’égard de son hôte en l’accusant d’être incompétent pour restaurer la paix dans son pays. Ce à quoi Tshisekedi n’avait pas manqué de rétorquer les liens ambigus entretenus par Paris avec Kigali depuis le dossier scabreux du génocide rwandais !

On est par ailleurs en droit de s’étonner du silence affiché par les médias occidentaux sur les exactions en cours au Congo et plus particulièrement les puissances anglo-saxonnes dont les intérêts économiques convergent avec ceux du régime de Paul Kagame.

Certains massacres seraient-ils plus légitimes que d’autres ?

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